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Pour la Grenouille Sonne le Glas : le grand frère caché de Link’s Awakening

Vous vous rappelez peut-être : dans The Legend of Zelda : Link’s Awakening, à un moment de l’aventure, on rencontre un certain Richard. Ne pouvant plus habiter son château car ses servants ont pété un câble, le prince s’est réfugié dans sa modeste villa, entouré par plusieurs grenouilles. Il faut alors lui ramener cinq feuilles dorées cachées dans son château, pour avancer.

À l’époque, ce personnage m’avait intrigué. Il a une musique dédiée, ce qui suggère une certaine importance, et pourtant son rôle se limite à ça. Et puis, il y a les grenouilles, dont la présence n’est pas du tout expliquée. Alors, pourquoi ? Plus tard, j’ai lu dans un magazine qu’en réalité, ce personnage de Richard n’est pas une création originale de Zelda : il fait partie des nombreux clins d’œil que fait Link’s Awakening à d’autres jeux vidéo. C’était donc ça ! Et si ces clins d’œil sont nombreux, on va voir que celui-là est peut-être le plus significatif.

Il s’agit d’une référence à Kaeru no Tame ni Kane wa Naru (Pour la Grenouille Sonne le Glas), sorti en 1992 sur Game Boy. C’est un projet développé par Nintendo R&D1, en collaboration avec Intelligent Systems. Il n’a jamais été traduit officiellement, et n’est jamais sorti en dehors du Japon, ce qui le rend méconnu chez nous. Ainsi, pendant de nombreuses années pour les non-japonisants, Kaeru no Tame ni Kane wa Naru a été cet étrange Action RPG exotique, à l’origine du personnage de Richard dans Link’s Awakening. Un jeu où il était question de princes et de grenouilles, donc. Pour ces raisons, j’ai toujours voulu le faire, sans que mon niveau de japonais me le permette.

Mais en 2011, la situation change. Un certain ryanbgstl publie une traduction amateur complète du jeu en anglais, sur ROMhacking. Et là, tout de suite, le jeu devient enfin accessible au plus grand nombre. Je ne pourrai jamais remercier assez ce genre de travail, crucial pour l’accessibilité du patrimoine culturel vidéoludique. Le titre du jeu en anglais devient : For the Frog the Bell Tolls. Cette traduction garde le sens original, tout en étant une référence à For Whom the Bell Tolls, le roman d’Ernest Hemingway (1940). À moins que ce ne soit à la chanson de Metallica… En même temps que son patch de traduction, ryanbgstl publie également l’outil qu’il a développé et utilisé spécialement pour ce jeu, baptisé Frogslator. Grâce à cela, les autres membres de la communauté peuvent réaliser des traductions dans d’autres langues. Ainsi, 3 ans plus tard, une traduction en français apparaît : Pour la Grenouille sonne le Glas. Je ne sais pas ce que vaut cette dernière traduction, mais dans le doute, je préfère privilégier celle de 1er niveau, c’est-à-dire en anglais.

On reconnaît tout de suite la coiffure caractéristique de Richard sur l’écran titre (à gauche). Cependant, il est absent de la jaquette, au profit d’un autre personnage, qui est le véritable héros du jeu : le prince de Sablé (à droite sur l’écran titre). « Sablé », pas comme la plage, mais comme les gâteaux. Oui, car dans Kaeru no Tame ni Kane wa Naru, beaucoup de noms propres proviennent du registre de la pâtisserie : le prince de Sablé, la princesse Tiramisu, le royaume de Mille-Feuilles, etc. Première surprise donc : le fameux Richard de Link’s Awakening n’est pas le héros de son jeu d’origine, mais un personnage secondaire, bien qu’important. Les deux princes sont à la fois amis d’enfance et rivaux. Lorsque le maléfique Delarin enlève la princesse, Richard et son ami se précipitent pour être chacun le premier à la sauver. Cependant, ils vont rapidement rencontrer une sorcière, qui va les transformer …en grenouilles. Et voilà qui explique les grenouilles autour de Richard dans Link’s Awakening ! En plus de sauver la princesse, un des enjeux sera donc de lever la malédiction de la sorcière grâce à une cloche en or, d’où le titre.

Bar !

Kaeru no Tame ni Kane wa Naru se présente sous la forme d’un Action-RPG, et d’emblée, on ne peut que remarquer les nombreux points communs avec Link’s Awakening. Que ce soit la musique de Kazumi Totaka, la police de caractères, l’alternance entre vue de dessus et vue de côté pour les donjons, il y a manifestement un lien de filiation entre les deux œuvres. Et pour cause : le moteur du premier a été amélioré et réutilisé dans Zelda par la suite. Malgré tout, Kaeru no Tame ni propose une aventure beaucoup plus linéaire et dirigiste que son petit frère, avec de nombreuses scènes scriptées pour dérouler le scénario. L’aspect exploration est ainsi bien moins présent. Mais la différence fondamentale se situe sans doute dans le système de combat, assez particulier. Lorsque le prince de Sablé entre en contact avec un ennemi, un nuage de poussière apparaît pour suggérer la bagarre, dans un style cartoon. Et là, le joueur doit …attendre. Ne rien faire du tout, jusqu’à la fin du combat. Et oui, car les combats sont AUTOMATIQUES ! Les deux barres de vie apparaissent, et chaque combattant attaque l’autre à tour de rôle, jusqu’à ce qu’une des deux soit vide. Pour gagner, la seule chose à faire est donc d’être plus fort que son adversaire, selon plusieurs statistiques : attaque, défense, vitesse, vie. Pour faire augmenter tout ça, pas d’expérience, mais des objets à trouver. C’est une des mécaniques utilisées dans la progression du jeu, en plus des quelques objets classiques à la Zelda, et des transformations. Ces transformations sont au nombre de deux : la grenouille donc, mais aussi le serpent. À la manière de Wonder Boy III – The Dragon’s Trap, chaque état (grenouille, serpent, humain) offre de nouvelles possibilités, et en supprime d’autres. Il faudra donc jongler entre les trois pour progresser. Et si vous manquez de vie, une bonne bouteille de pinard, et ça repart ! Eh oui, c’est aussi un avantage d’une traduction amateur : échapper à la censure. Nul doute que les nombreuses références à l’alcool n’auraient pas trop plu au Nintendo of America de 1992, comme cette ville minière où tout le monde est bourré.

Aucune compétence d’adresse ou de réflexe n’est donc nécessaire de la part du joueur. Pour gagner, il faut être à jour dans sa force, en trouvant toutes les upgrades (pas très bien cachées d’ailleurs), et résoudre quelques énigmes avec les transformations. Pas de vies non plus : la mort n’est pas très punitive, et nous renvoie simplement au dernier hôpital croisé. Ajoutée au côté dirigiste, cette orientation dans les mécaniques ludiques confère au jeu un côté accessible et reposant. Personnellement, je l’ai fait juste après The End is Nigh, et c’était tout à fait l’expérience qu’il me fallait à ce moment-là. Même dans l’absolu, c’est un très bon jeu, qui dégage quelque chose de particulièrement charmant. Que ce soit les noms propres à base de desserts, la rivalité amicale et comique des deux protagonistes, l’humour un peu loufoque, on retrouve une partie du charme espiègle de Link’s Awakening. C’est une perle cachée de plus pour la Game Boy, comme il y en a beaucoup.

Je suis très content de l’avoir enfin fait, après toutes ces années. Déjà parce que j’ai eu beaucoup de plaisir dessus, mais aussi parce qu’il est important dans l’univers de Nintendo. En effet, Link’s Awakening n’est pas le seul à lui rendre hommage : on peut aussi retrouver le docteur Mad Scienstein (nom variable selon les jeux), dont le crâne chauve ressemble à une paire de fesses, comme personnage récurrent dans la série Wario Land. Ou encore, le prince de Sablé en tant que trophée dans la série Super Smash Bros. Tout ça, ça vient de là !

PS : si vous vous demandez si la chanson de Totaka est bien dans le jeu, la réponse est évidemment oui, et elle n’est pas évidente à trouver :


Par Tardigrade
Le 25 janvier 2018 | Catégories : Articles, Editos

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